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La dyarchie de l'exécutif en Russie


La dyarchie de l’exécutif en Russie

Karine Bechet-Golovko

Maître de conférences à EHU (European Humanities University, Vilnius)

 

Article publié à la Revue de droit public, 2/2013

 

1. L’organisation de la dyarchie au service des déformations institutionnelles

1.1 Le cadre institutionnel de la dyarchie de l’exécutif

1.2 Les déformations institutionnelles générées par le système constitutionnel

2. L’organisation clanique du pouvoir au-delà du texte constitutionnel

2.1 Les modalités claniques du droit de nomination

2.2 L’illusion du pluralisme politique et les modalités claniques de la vie politique

 

 

 

« Le suffrage universel est un sacre bien autrement divin que l’huile de Reims ou le sang de Saint Louis. Il ne faut pas tenter Dieu, encore moins l’homme. Le président pourra dire à l’Assemblée : " vous n’êtes que les neuf centièmes du peuple. Je suis à moi seul le peuple entier" » . [1]Cette affirmation, pleine de bon sens, ne fonctionne pourtant que dans un cadre institutionnel « normalisé », à savoir quand l’accession au pouvoir dépend de l’expression de la volonté populaire, volonté qui peut amener le titulaire du pouvoir à partir. Le Chef de l’Etat est alors effectivement tout puissant, pour le temps de sa fonction. Ce schéma d’une fonction présidentielle forte, a été repris en Russie et dans les discours des constitutionnalistes russes, à l’image d’un De Gaulle s’installant au Kremlin. Il lui manque toutefois un élément clef, la responsabilité. Le chef de l’Etat en Russie, comme la plupart des hommes « politiques » de ce pays, ne sont de facto pas soumis à une responsabilité politique, dans laquelle ils rendent des comptent à leurs électeurs et sont sanctionnés par eux. Ils rendent des comptent à l’appareil d’Etat, au clan, et ne sont sanctionnés que pour la trahison au clan. Et le clan porte la personnalité du dauphin, qui prendra la place vacante, institution mise en place par Boris Eltsine, se fondant quant à lui sur sa légitimité électorale, au profit de Vladimir Poutine. C’est cette logique clanique qui déforme profondément la logique institutionnelle russe, et touche particulièrement les rapports de l’exécutif, source principale du pouvoir. Dans cette perspective, les éléments juridiques organisant une dyarchie au sein de l’exécutif ne servent qu’à mettre en place le cadre institutionnel de la déformation du pouvoir (1). Par la suite, ces déformations se sont structurées au cours de la pratique politico-constitutionnelle russe et, en quelque sorte, institutionnalisées autour de deux clans qui se répartissent le pouvoir et constituent le réel élément de dyarchie (2).

 

1. L’organisation de la dyarchie au service des déformations institutionnelles

            Le système constitutionnel russe ne prévoit pas précisément la place du Président dans la division tripartite des pouvoirs. Formellement, donc, il n’appartient pas au pouvoir exécutif, avec lequel il entretient toutefois des rapports très étroits. Selon la loi constitutionnelle fédérale[2] sur le Gouvernement de la Fédération de Russie[3], le Gouvernement est l’organe supérieur du pouvoir exécutif en charge de son exercice. Mais le Président, soit directement, soit par l’intermédiaire de l’Administration présidentielle, intervient largement dans l’exercice du pouvoir exécutif, qu’il oriente, dirige et contrôle. Le cadre institutionnel mis en place facilite donc l’existence d’une dyarchie dans le pouvoir exécutif (1.1), mais en renonçant à préciser clairement les rôles respectifs de ses titulaires, il ouvre la voie aux déformations institutionnelles, ensuite renforcées par la pratique (1.2).

 

1.1 Le cadre institutionnel de la dyarchie de l’exécutif

           

La position du Chef de l’Etat est une question doctrinale douloureuse, sur laquelle aucun consensus n’a été atteint et la doctrine se divise encore. V. O. Loutchine indique en ce sens que si le rôle du Président en tant que garant de la Constitution est un aspect traditionnel de la fonction présidentielle, son positionnement dans la répartition tripartite des fonctions du pouvoir d’Etat ne peut découler des formulations du texte constitutionnel. L’Assemblée fédérale est en charge du législatif, le Gouvernement de l’exécutif et les juridictions du judiciaire. Que reste-t-il alors au Président, pourtant indiqué dans l’article 11 comme un des titulaires du pouvoir d’Etat ?[4]

 

Très souvent la doctrine le situe en dehors de la répartition tripartite du pouvoir, ce qui permet d’écarter la question sans la régler. En effet, certains auteurs comme N. V. Vitrouk, dans leur manuel de droit constitutionnel, analysent en détail la fonction présidentielle, les compétences du Président, mais n’évoquent pas la question de son positionnement théorique[5]. D’autres auteurs, en revanche, comme S. A. Avakian, remontent à la mise en place de la fonction présidentielle à la fin de l’époque soviétique pour tenter d’en comprendre les mécanismes actuels. Et dès cette époque, l’idée de la place institutionnelle du Président n’était pas très claire. Il fallait un Président à la Russie soviétique, car il fallait une personnalité suffisamment forte pour renforcer l’autonomie de la république, défendre ses intérêts et la représenter[6]. Mais c’est de 1991 à 1993 qu’est réellement née la fonction présdientielle russe et également le dualisme de l’exécutif.

 

Dès sa prise de fonction, B. Eltsine travaille à la formation de son Gouvernement et à la création de son Administration présidentielle. Cette dualité va rester et se renforcer avec le temps et les nécessités politiques. Aujourd’hui encore, l’appareil de l’exécutif reste emprunt de cette dualité, car une partie des organes sont formés sous l’autorité du Gouvernement et une partie sous celle du Président.[7] Selon le professeur Avakian, avant l’adoption de la Constitution de 1993, le Président était considéré comme à la tête de l’exécutif, avec l’adoption de la nouvelle Constitution il est réellement à la tête de l’Etat. Ce qui l’amène à la conclusion selon laquelle « le Président n’entre pas dans la division des pouvoir, il la domine »[8].

 

Il ressort donc du texte constitutionnel, une seule certitude : trois organes sont intimement liés à l’exécutif, à savoir le Président, le Gouvernement et l’Administration présidentielle.

 

Le Président nomme le chef du Gouvernement[9], sur proposition du chef du Gouvernement il nomme les ministres et les membres du Gouvernement, il peut renverser le Gouvernement[10]. Les actes du Gouvernement doivent être conformes aux actes du Président, sous peine de quoi leur légalité peut être contestée. La loi constitutionnelle (organique) fédérale sur le Gouvernement fédérale reprend et précise ces dispositions. Plus concrètement, il est prévu que le Président dirige l’activité des organes fédéraux du pouvoir exécutif en ce qui concerne les questions relatives à l’armement, à la sécurité, aux affaires intérieures, à la justice, aux affaires étrangères, aux circonstances exceptionnelles et aux catastrophes naturelles. Il dirige directement ces organes par l’intermédiaire des ministres fédéraux. Il réparti la compétence entre ces organes et le Gouvernement coordonne leur activité.[11] La loi constitutionnelle (organique) prévoir donc la soumission du gouvernement au Président, tant au niveau de sa formation, que de la politique menée dans les domaines clefs de l’Etat. Toutefois, le Président ne peut renverser le Gouvernement de sa propre initiative, il n’en a la compétence que lors d’un conflit ouvert avec le Parlement dans lequel le Gouvernement perd la confiance ou lors d’une demande en ce sens présentée par le chef du Gouvernement.[12] En ce qui concerne l’activité politique du Gouvernement, il est en général admis qu’il lui revient essentiellement la conduite de la politique économique du pays.

 

Cette loi constitutionnelle prévoit également la collaboration de l’appareil gouvernemental avec l’Administration présidentielle pour l’exécution des fonctions attribuées au Gouvernement.[13] Or, la figure de l’Administration présidentielle est plus énigmatique. Si elle a été mise en place par Boris Eltsine dès son entrée en fonction, sa régulation est très souple. Elle est simplement citée une fois dans la Constitution qui ne fait que prévoit son existence[14] et par différents oukases. Aucune loi fédérale ne pose ni sa structure, ni son mode de fonctionnement, c’est un organe d’une grande souplesse qui doit couvrir tous les besoins politiques du Chef de l’Etat, et ces besoins sont à la mesure de ses domaines de compétence. Elle est composée d’un secrétaire de presse, de différents conseillers, de différents départements, d’organes comme le Conseil de sécurité qui prépare la politique présidentielle en matière de politique intérieure ou du Conseil d’Etat qui est un organe consultatif sur la question de la coordination de l’activité des différents organes d’Etat. Il serait possible de penser qu’une structure quelle que peu stable ait été mise en place depuis 2004, date à laquelle un oukase, toujours en vigueur, a été adopté sur l’Administration présidentielle[15]. Pourtant, il a été modifié en 2005, deux fois en 2010 et trois fois en 2012. En ce qui concerne le réglement de l’Administration présdientielle adopté en avril 2004[16], il fut modifié la première fois dès juin 2004, puis en 2005, 2007, 2008, 2010 et 2011, à ce jour. Parallèlement, une réflexion sur l’amélioration de la structure de l’Administration présidentielle a été menée dès 1998, formalisée par un oukase du Président Eltsine[17] et a conduit à de nombreuses modifications concernant la structure jusqu’en juin 2005, date de la dernière modification de cet oukase[18]. Pourtant, il serait erroné de croire la structure fixée. Car de nombreux oukases autonomnes sont depuis intervenus dans le domaine, modifiant certains départements de l’Administration présidentielle.[19]

 

L’évidence, sinon de l’impossibilité, du moins de la grande difficulté de tracer une carte complète et claire du fonctionnement de l’Administration présidentielle saute aux yeux. Et cette flexibilité est une arme redoutable. A la différence du Gouvernement, l’Administration présidentielle ne dépend pas de l’Assemblée fédérale, qui ne peut ni lui octroyer ni lui retirer ni sa confiance ni sa défiance, qui ne peut donc pas provoquer un renversement comme pour le Gouvernement. L’Administration présidentielle procure ainsi au Président la possibilité de contourner un conflit avec le Parlement, de gérer le pays en situation de conflit institutionnel intérieur, comme l’a fait en son temps B. Eltsine. En ce sens, le dualisme Administration présidentielle / Gouvernement permet de modifier de facto la conception de la séparation des pouvoirs en Russie. Traditionnellement classée dans la catégorie de séparation souple des pouvoirs en raison des pouvoirs croisés de dissolution et de mise en jeu de la responsabilité, le rôle de l’Administration présidentielle insère un élément de rigidité dans la séparation des pouvoirs.

 

Le système constitutionnel russe prévoit donc la possibilité de trois modes de gouvernance. Le premier, celui de la normalisation du fonctionnement institutionnel, est plutôt proche du modèle français en situation de fait majoritaire. Un Président fort qui décide des grandes orientations, un Gouvernement qui les met en place en collaboration avec le Parlement, même si le poids du Président est, en Russie, renforcé par son Administration présidentielle. Ce premier mode correspond au premier cycle de présidences de V. Poutine. Le deuxième mode de gouvernance est celui du dépassement d’un conflit institutionnel, quand le Président doit recourir à l’Administration présidentielle pour gouverner le pays en dépassant l’opposition du Parlement et ne pas dépendre d’un Gouvernement de compromis qu’il a été plus ou moins obligé de former. Ce schéma correspond à la période de présidence de B. Eltsine, dès 1993, marquée par les nombreux conflits avec l’institution parlementaire. Le troisième schéma est celui du dépassement du Gouvernement par l’Administration présidentielle, dans un conflit interne à l’exécutif, si on lie la fonction présidentielle à l’exécutif ou dans le cadre d’un conflit entre la fonction présidentielle et l’exécutif si on les dissocie. Il s’agit ici de la dernière présidence de V. Poutine, celle qui est en cours. En ce qui concerne la présidence de D. Medvedev, c’est une question à part, une déformation en soi du système, qui sera traitée séparément.

 

La complexité et l’imprécision de la répartition des rôles entre le Président et le chef du Gouvernement ouvrent donc la place à des déformations institutionnelles, qui seront encore aggravées par la pratique politique.

 

1.2 Les déformations institutionnelles générées par le système constitutionnel

 

Comme cela vient d’être montré, le système constitutionnel ouvre la porte à un certain nombre de déformations institutionnelles, qui, pour les plus importantes du point de vue de la dyarchie de l’exécutif, sont : l’instauration de l’institution du « dauphin » et l’absence de facto de responsabilité politique des membres du Gouvernement.

 

L’institution du dauphin a été mise en place par B. Eltsine, pour ne pas prendre le risque d’une perte de pouvoir de « son » clan, ou comme comme certains l’appellent « la famille ». Cette véritable « opération politique » va pouvoir s’appuyer sur les résultats des élections législatives de 1999, où pour la première fois la coalition des partis soutenant le pouvoir obtient un score confortable[20], permettant ainsi au Gouvernement de réellement diriger. C’est dans cette configuration que V. Poutine, nommé Premier ministre en août 1999, semble légitimé pour assurer l’intérim après la démission de B. Eltsine, le 31 décembre 1999. Il devient le premier « dauphin », mais doit recevoir le sacre électoral par les élections présidentielles du 26 mars 2000. Avec 11 candidats, l’élection devait se trouver placée sous le signe du pluralisme, mais la campagne a totalement été dominée par la question de la guerre en Tchétchénie et certains candidats ont même appelé les électeurs, vu le contexte politique, à soutenir V. Poutine[21]. La manière concrète dont se sont déroulées les élections montrent bien qu’il s’agissait d’une opération de légitimation et non d’une élection : il fallait sacrer le dauphin. Il le fut dès le premier tour. L’institution du dauphin semble alors être installée.

 

D’un point de vue institutionnel, il ne peut y avoir de « dauphin » que lorsque certaines conditions sont réunies. Il faut tout d’abord que la légitimité du « père politique » ne soit pas remise en cause, pour que son choix ne le soit pas. Il faut ensuite une soumission des acteurs politiques qui acceptent de jouer le jeu, c’est-à-dire de participer pour perdre. Enfin, il faut l’acceptation de la population, pour que le « dauphin » devienne dirigeant légitime et puisse à son tour désigner un dauphin le moment venu. Autrement dit, le Président sortant doit avoir eu le sacre électoral, qui légitime « son droit » de choisir son successeur. Donc les processus électoraux doivent être acceptés et les opposants faibles ou « de poche ». Ce qui ôte toute possibilité à l’existence d’une réelle opposition politique, d’une réelle alternance au pouvoir. Le nouveau Président doit, lui-même, avoir un score plus qu’honorable lors de son élection, pour ne pas laisser penser à un partage de l’opinion publique, sa position serait trop affaiblie. Il doit ensuite absolument mener une politique démagogique pour renforcer sa popularité et emmener l’adhésion populaire dans un rapport très personnel, presque affectif de gouvernance. Il s’agit d’une forme moderne de paternalisme politique, comme il le fut en son temps en matière industrielle. Le Président sortant est alors en mesure de choisir son dauphin, mais la règle veut son départ.

 

Dans un premier temps, V. Poutine a rempli toutes les conditions. De « dauphin » il est devenu « gouvernant ». Pourtant des difficultés apparaissent à la fin de son deuxième mandat, au moment où se pose la question du départ. Il se refuse à modifier la Constitution pour pouvoir enchaîner un troisième mandat consécutif, alors que sa côte de popularité est toujours au beau fixe et que de nombreuses personnalités politiques intérieures et étrangères l’y encouragent.[22] Mais il se refuse aussi à réellement quitter le pouvoir. Et la question du dauphin se pose à nouveau. L’hésitation porte entre S. Ivanov, proche de V. Poutine, dans la tendance conservatrice, et D. Medvedev, également proche, mais dans la tendance libérale. Or, si V. Poutine ne veut quitter le pouvoir, il faut une contre partie pour l’image de la Russie à l’international. Le rôle du « méchant » est déjà pris, la candidature de S. Ivanov risque de renforcer cette image négative, et auprès du milieu des affaires (intérieur ou étranger), et sur la scène internationale. Le clan libéral ressentirait un déficit de représentation. Le choix finalement se porte sur D. Medvedev, qui gagne lui aussi les élections au premier tour, le 2 mars 2008 avec plus de 70% des voix.[23]

 

Mais une des conditions essentielles du succès de l’opération dauphin n’est pas remplie et ne peut l’être. Avant même les résultats électoraux, et lors de la campagne électorale, D. Medvedev annonce proposer le poste de Premier ministre, en cas de victoire évidemment, à V. Poutine, qui l’accepte.[24] Opération menée lors de l’assemblée générale du parti Edinaya Rossiya. Les rôles sont ainsi bien définis. Le « méchant » garde son rôle de méchant, il sécurise une partie de l’électorat conservateur et apparaît le « gentil », qui provoque une vague d’espoir dans l’opposition, vague qui va finalement le submerger, rassure le clan libéral. Formellement, bien sûr, la technologie politique ayant évoluée depuis l’époque de B. Eltsine, la candidature de D. Medvedev a été lancée par le parti Edinaya Rossiya[25], dirigé par V. Poutine (qui n’en a jamais officiellement fait partie) lors de l’assemblée générale du 17 décembre 2007. Et cette candidature a été soutenue, outre par Edinaya Rossiya, également par d’autres partis, à savoir Spravedlivaya Rossiya[26], Agrarnaya partia[27] et Grajdanskaya sila[28].[29] L’opération continue par la mise en scène de la passation non formelle des pouvoirs, le soir de l’annonce des résultats électoraux. V. Poutine et D. Medvedev arrivent côte à côte sur la place rouge sur une chanson d’un groupe « patriotique » (dont le chanteur est depuis devenu député à la Douma), mise en scène remarquable lors de laquelle l’ancien Président passe le pouvoir au nouveau, mais tout en restant à côté[30], dans tous les sens du terme. Il n’y a pas eu de réactions particulières, car l’espoir d’une libéralisation du système tant juridique que politique était vraiment présent dans les esprits. Seuls les observateurs internationaux qualifiaient ce processus électoral de plébicite et non d’élections[31]. Toujours en ce qui concerne la mise en scène, mais aspect très significatif de ces passations de pouvoir, lorsque V. Poutine revient au pouvoir et gagne les dernières élections présidentielles de mars 2012, il arrive à nouveau avec D. Medvedev, à nouveau sur la place rouge, seule la musique a changé. Cette fois-ci, D. Medvedev semble lui rendre un bien qu’il n’a eu en dépôt que temporairement et dont il a assuré la maintenance.

 

La présidence de D. Medvedev a donné une grande leçon en matière de pratique constitutionnelle. Elle a permis d’enlever tout doute possible quant à la source du pouvoir, qui ne dépend pas du texte de la Constitution, mais de la personnalité de l’individu très concret qui occupe la fonction. Si le schéma constitutionnel prévoyait de larges pouvoirs au Président, V. Poutine a réussi à diriger le pays au quotidien depuis le Gouvernement. Pour autant, il serait illusoire d’en déduire que D. Medvedev n’a pas gouverné. Il a échoué dans ses réformes (justice et police essentiellement) et a ainsi provoqué une grande désillusion. Mais, malgré un discours libéral, il a pu renforcer le contrôle présidentiel sur certaines questions clefs, notamment pour la justice. Pour illustrer ce propos, il est intéressant de souligner deux phénomènes. Le premier est celui de la « légalisation » par la Douma de la reconnaissance de pouvoirs « extra constitutionnels » au Président, par une analyse comparée des présidences Poutine et Medvedev. Le second concerne l’évolution de l’activité en matière d’initiative législative lors de ces deux périodes.

 

Si une comparaison est faite entre les présidences Poutine et Medvedev sur l’élargissement des compétences « extra constitutionnelles » du Président, il apparaît clairement que Poutine a fortement renforcé la fonction présidentielle, alors que Medvedev est resté plus en retrait. Pour cela, il est possible de s’appuyer sur l’analyse faite par le professeur M. Krasnov[32].

 

En partant d'une analyse de la production législative depuis l'entrée en vigueur de la Constitution de 1993, l’auteur a noté l'adoption de 294 documents législatifs prévoyant des compétences présidentielles. En corrigeant les données pour exclure les textes qui ne font que répéter les compétences déjà prévues par la Constitution, le total est de 116 lois qui prévoient en tout 473 nouvelles compétences. Ces compétences, non prévues intialement, touchent essentiellement:

  • l'organisation et l'activité des organisations sociales et autres organisations non gouvernementales;
  • l'organisation et l'activité des organes du pouvoir d'Etat et leurs structures comme les organes intervenant dans le domaine de la sécurité, de la défense, de la légalité ou du maintien de l'ordre;
  • les services publics;
  • la politique budgétaire et le contrôle financier;
  • les relations économiques;
  • la culture;
  • la science et la technique;
  • l'enseignement.

 

La plupart de ces attributions de fonction se justifient au regard des compétences présidentielles de détermination de la politique intérieure et extérieure du pays, reconnues par la Constitution, mais l'interprétation qui en est faite porte atteinte au principe de séparation des pouvoirs. Puisqu'il s'agit dans la Constitution de la détermination de ces politiques et non de l'intervention directe du Président sur toutes les questions. Selon les résultats de l'analyse, quatre groupes principaux de compétences spéciales ont été dégagés. Il s'agit:

  • des compétences sortant des compétences présidentielles prévues par la Constitution et des fonctions présidentielles normales;
  • des compétences de régulation des services de sécurité et militaires et de leur direction;
  • des compétences de régulation des services publics civils et de leur direction;
  • des compétences qui formellement concrétisent les compétences constitutionnelles du Président, mais qui en réalité contreviennent à la Constitution.

 

Dans ces 4 catégories, sous la présidence Eltsine, les compétences du dernier groupe n'ont pas été utilisées, et dominent les compétences du premier groupe (environ 20), suivies du deuxième et troisième groupe, respectivement un peu plus de 10 et 3. La présidence Poutine est marquée par la domination de la reconnaissance de compétences du premier groupe (plus de 60) et du troisième groupe (plus de 30). La présidence Medvedev, pour sa part, est marquée par une légère domination de la première catégorie des compétences (presque 20) et du dernier groupe (environ 10). On notera que la période la plus productive en matière de reconnaissance législative de compétences extraconstitutionnelles est de loin la présidence Poutine. 40 sous B. Eltsine, 38 sous D. Medvedev pour 109 sous V. Poutine. Toutefois, en rapport des compétences "normales" et des compétences "extraconstitutionnelles", les présidences Medvedev et Poutine se valent: environ la moitié des compétences reconnues au Président dans les deux cas sortent du cadre constitutionnel (24% sous Eltsine, 43% sous Poutine et 46% sous Medvedev).

 

Non seulement la proportion des compétences non prévues par la Constitution reconnues au Président par le pouvoir législatif augmente, mais elles sont de plus en plus importantes sur le fond. Il s'agit notamment, sous la présidence Medvedev, du droit de nommer et révoquer le président de la Cour constitutionnelle[33] ou les présidents des universités d'Etat de Moscou et Saint Petersbourg[34]. Il s'agit aussi par exemple du droit de déterminer le régime d'appréciation de l'effectivité des organes locaux et sur ce fondement la possibilité de révoquer le Gouverneur concerné[35].

 

            En ce qui concerne le droit d’initiative législative, l’ambigüité du rôle de la présidence Medvedev apparaît tout autant. Il semble avoir rempli son rôle « libéral », d’une certaine manière. Surtout en ce qui concerne la libéralisation de la vie politique, même si ses initiatives viennent plus de l’impulsion des mouvements de masses que d’une volonté politique longuement réfléchie. Tous les projets de loi touchant les questions centrales des réformes du système juridique, comme la réforme de la police[36] ou de l’enregistrement des partis politiques[37] par exemple, ont été d’origine présidentielle. Par ailleurs, l’évolution de l’activité de l’initiative en matière législative s’est profondément modifiée sous la présidence Medvedev. Reflet d’un Président particulièrement faible, elle s’est fortement reportée vers les députés, autrement dit le parti au pouvoir, Edinaya Rossiya, a repris les rènes du pouvoir avec le Gouvernement, alors sous la direction de V. Poutine. Ainsi, lors de la VIIIe législature (2004-2007), quand V. Poutine était Président, les initiatives législatives se répartissaient relativement équitablement entre leurs titulaires. L’on notera à cette époque le retrait du Président et la faible activité législative dans son ensemble. De 73 initiatives législatives à cette époque pour les députés fédéraux, les chiffres sont montés à 429 sous la législature suivante, lorsque D. Medvedev était Président de la Fédération. De la même manière, alors que le Gouvernement n’avait présenté que 7 projets de loi sous la VIIIe législature, lors de la IXe on en a compté 55. Il semble s’être opéré un déplacement de l’activité du Président vers le Parti et ses représentants. Le Président mettait en place ses grandes réformes, mais le Gouvernement s’occupait de la vie du pays.

 

La destructuration des mécanismes institutionnels au profit d’une répartition personnelle, à l’amiable des compétences entre le Président et le Gouvernement, trouve ses racines dans une évolution plus profonde et beaucoup plus dangereuse pour le fonctionnement de l’Etat russe. Il n’est pas possible de comprendre l’évolution des rapports entre le Président et le Gouvernement, en la figure du Premier ministre, si l’on s’arrête à une grille d’analyse, selon laquelle le président décide de tout et le Gouvernement est soumis. La réalité du fonctionnement des institutions russes est beaucoup plus complexe, beaucoup moins systémique, beaucoup moins institutionnelle. Il s’agit d’une logique clanique du pouvoir, qui permet d’expliquer le maintien de D. Medvedev au pouvoir, parallèlement au retour de V. Poutine à la présidence.

 

2. L’organisation clanique du pouvoir au-delà du texte constitutionnel

 

            Le pouvoir s’organise en Russie selon un schéma désormais posé explicitement, depuis la fin de la présidence Medvedev. Les modalités constitutionnelles d’une dyarchie au sein de l’exécutif, sous l’influence de la pratique politique, ont débouché sur une interprétation et une pratique clanique du pouvoir. En ce sens, les réformes et l’utilisation du droit de nomination ont clairement montré l’apparition de l’enjeu clanique (2.1). Cette pratique est rendue possible par le caractère illusoire du pluralisme politique, puisque la réelle division politique du pays est concentrée à l’intérieur de ces deux clans – le clan libéral et le clan conservateur – au sein même de l’exécutif, ce qui positionne différemment la question de la dyarchie de l’exécutif (2.2).

 

2.1 Les modalités claniques du droit de nomination

 

Que les prérogatives présidentielles en matière de nomination soient utilisées de manière politique, c’est-à-dire pour servir les intérêts de son clan politique, cela est loin d’être une spécificité du système russe. Il est normal de nommer des personnes qui vous sont proches, avec lesquelles il est possible de travailler dans le même sens. Le problème ne vient pas de là, mais du contexte politique. En l’absence d’un véritable pluralisme politique, qui n’implique pas uniquement un simple changement, voire rotation, de personnes, mais un changement de courant politique au pouvoir, l’utilisation du droit de nomination ressort d’une logique clanique, presque féodale, puisqu’il n’arrive pas de nouvelle « famille » politique modifiant l’ordonnancement des nominations. Et le fonctionnement tant de la haute fonction publique russe, que de la circulation des élites politiques – ou plutôt de leur absence de circulation – ressort de cette logique clanique, dans laquelle on défend les siens, parce qu’ils sont inféodés et ne présentent pas de danger pour le clan, quelle que soit leur popularité, au détriment de toute logique démocratique.

 

Le meilleur exemple en la matière est le retour de D. Medvedev au poste de Premier ministre. Malgrè son incapacité à mener les réformes annoncées (échec cuisant de la réforme de la police, échec de la réforme de la justice, notamment), malgrè sa faible popularité, malgrè son absence totale de poids politique dans les structures internes, V. Poutine ne pouvait pas l’écarter. Il lui a donc proposé le poste de Premier ministre, en a fait le chef du parti Edinaya Rossiya – dont il reste le véritable dirigeant. L’obligation avait un double fondement. Le premier, évident, réside dans le fait que le « contrat » avait été passé entre les deux hommes, D. Medvedev devait être l’hôte du Kremlin pendant un mandat pour permettre à V. Poutine de revenir sans modifier le texte constitutionnel. Le second ressort plus des mécanismes cachés de la vie politique russe. D. Medvedev est porté par le milieux des affaires, celui des libéraux intégrés et « progressistes », alors que V. Poutine est plutôt soutenu par les siloviki, autrement dit les hommes d’appareil. Le poids de ces deux grands groupes est à peu près identique. Or, leurs intérêts se croisent souvent, les hommes d’Etats étant liés aux intérêts économiques, l’intérêt d’Etat se confond alors avec les intérêts très particuliers[38], notamment en matière de gestion des ressources énergétiques. Il s’agit donc de pouvoir préserver les intérêts de ces deux clans dans un équilibre précaire.

 

            Toujours en matière l’allégeance, il est possible de rappeler la réforme qui a entraîné la supression de l’une des garanties d’indépendance de la Cour constitutionnelle. Revenant sur le principe de l’élection interne par ses pairs du président de la Cour, la réforme de 2009[39] donne le droit au Président russe de proposer au Conseil de la Fédération la candidature du président de la Cour constitutionnelle. Ce mécanisme a été renforcé en 2010[40] par le droit reconnu au Président russe de demander l’examen par le Conseil de la Fédération de la suspension des fonctions de président et vice-président de la Cour constitutionnelle s’ils n’exécutent pas leurs obligations ou s’ils ne les exécutent pas correctement. Cela oblige à l’obéissance plus qu’à la compétence.

 

            Un autre exemple significatif et révélateur de l’importance du positionnement des personnalités dans la détermination de la politique intérieure, cette fois-ci sur un plan strictement politique, est celui de la rotation des cadres, qui a eu lieu à l’Administration présidentielle et au Gouvernement lors des deux dernières élections législatives et présidentielles. Cette rotation a officialisé l’existence des deux clans – réels – mais non institutionnels, puisque’ils ne se formalisent pas en partis politiques. Ils reflètent plutôt les intérêts contradictoires réels du champ politique caché, mais agissant. A l’occasion des élections législatives, un jeu de chaises tournantes se met en place. Et le triangle Administration présidentielle / Gouvernement / Douma devient un haut lieu de sanction électorale et de préparation des nouvelles échéances politiques. Cela va se passer autour de l’Administration présidentielle et autour des figures de V. Surkov[41] et V. Volodine[42].

 

De nombreux changements sont intervenus dans l'Administration présidentielle, où se regroupent les hommes de V. Poutine. Ainsi, Sergueï Ivanov – alors vice-premier ministre de V.  Poutine/Premier ministre –  a pris la direction de l'institution, quittant le Gouvernement juste un peu avant son maître et lui préparant la place. S. Narychkine[43], lui, est parti de la direction de l’Administration présidentielle pour prendre la place de B. Gryzlov[44] à la Douma, dont la réputation était trop entâchée et pour maintenir ainsi le lien entre les parlementaires et le pouvoir, dans un contexte qui s’annonce mouvementé et trop difficile à gérer pour la figure controversée de B. Gryzlov. Pour renforcer le passage de pouvoir, enlevant le dernier levier politique de D. Medvedev, V. Surkov, cerveau de la politique intérieure russe depuis 11 ans, quitte son poste de vice-président de l'Administration présidentielle pour s'occuper de questions diverses et sans grande importance au Gouvernement. A sa place apparaît V. Volodine, fidèle des méthodes poutiniennes de gouvernance, très loin de la subtilité machiavélique de son prédécesseur.

 

Le "couple" Medvedev/Surkov rendait la politique de Medvedev plus libérale que celle de Poutine, si ce n’est sur le fond, au moins dans la forme. L'intervention de V. Surkov permettait de mettre en place un langage de pouvoir qui prenait les formes libérales et démocratiques, en réponse aux demandes de « l'Occident ». Le couple "Volodine/Poutine" indique tout de suite que le « Poutine » qui arrive n'est plus celui qui est parti. Celui-ci a besoin de renforcer sa position, si nécessaire artificiellement. Il n'est plus le leader national incontesté[45], sans alternative, qui sauve le pays de la menace terroriste, du séparatisme rampant et de l'ombre menaçante des révolutions en couleurs. Il s’agit d’une rupture politique, l’affirmation d’un pouvoir. Mais ce pouvoir est aujourd’hui en partie contesté, en partie soutenu, et le nouveau Président est appelé à faire ses preuves.[46] De toute manière, la présence de Volodine n’indique pas une volonté de composer avec les différents groupes politiques.

 

            En ce qui concerne les négociations à la Douma, la répartition des comités à donné lieu à quelques échanges médiatiques, mais dans l’ensemble les objectifs n’ont pas été atteints par l’opposition. Edinaya Rossiya ayant toujours la majorité, le parti peut largement déterminer la répartition des postes. Les présidents des partis se sont exclamés contre les falsifications, contre l’illégitimité des élections – et donc de la Douma actuelle – D. Medvedev a promis que tous les recours seraient examinés, et évidemment les choses en sont restées là, personne ne voulant prendre le risque de perdre son mandat. En réalité, la question était beaucoup plus prosaïque : comment rentabiliser le mouvement populaire et la baisse d’Edinaya Rossiya pour prendre le pouvoir de quelques comités à la Douma ? Si Edinaya Rossiya a cédé certains comités, beaucoup estiment qu'elle garde le contrôle des aspects les plus importants de la vie politique russe, comme la sécurité ou le budget, et laisse uniquement ce qui aura peu d'influence sur le processus législatif. Un accord avait été trouvé sur le nombre de comités (29 et non 32 comme auparavant), dont 15 seront dirigés par Edinaya Rossiya (Russie Unie)[47], 6 par les communistes[48], 4 par LDPR[49] et 4 par Spravedlivaya Rossiya (Russie juste)[50]. Dans ce combat, S. Narychkine a joué le rôle d’une monnaie d'échange. En d'autres termes, les fractions affirmaient voter pour lui, si elles obtenaient ce qu'elles voulaient en matière de direction de comités. Les négociations ne se sont pas particulièrement bien passées pour l’opposition.[51] Edinaya Rossiya ne reconnait qu’une répartition formelle en fonction du nombre de comités et sans tenir compte de leur importance, en conséquence de quoi aucun des députés des autres fractions n’a soutenu la candidature de S. Narychkine. Il faut souligner que ceci est le premier geste d’opposant de ces partis. Le geste est beau, esthétique, mais de toute manière Edinaya Rossiya a les moyens d’imposer la volonté du Président puisqu’elle garde encore la majorité. D’où l’intérêt pour le pouvoir de préserver envers et contre tout ce parti en position dominante, malgrè son impopularité naissante. D’où également l’apparition de S. Narychkine, homme de confiance qui a fait ses preuves, pour tenir l’institution dans une période politique incertaine pour le clan conservateurs.

 

            Le dernier acteur de ce triumvira est le Gouvernement. Un nouveau jeu de chaise tournante a eut lieu entre le Gouvernement et l’Administration présidentielle après les élections présidentielles, qui ont marqué le retour de V. Poutine. En effet, l’après présidentielles montre la technicisation du Gouvernement et le transfert des personnalités politiques à l’Administration présidentielles. Dans l'ensemble, de nombreuses nouvelles têtes, absolument inconnues du grand public (souvent occupant des fonctions de second ordre dans les gouvernements précédents), des figures de remerciements et quelques survivants constituent le nouveau Gouvernement. Le seul premier vice-premier ministre a avoir gardé son poste est I. Chuvalov, qui occupe la même fonction. Mais comme il l'a déjà démontré par le passé, il n'a jamais pu réaliser sur le plan politique les idées qu'il avançait. Donc son poids réel pour rénover le système laisse perplexe. D'autres personnalités, classées comme réformateurs libéraux, vont également se confronter à des difficultés, il s'agit du vice-premier ministre A. Dvorkovitch (gaz et pétrole, agriculture et industrie) et du ministre spécialement mis en place pour les relations avec le "Gouvernement ouvert"[52], M. Abyzov. Dvorkovitch va se trouver confronté à Gazprom et il difficile d’envisager qu’il fasse le poids, quant à Abyzov, il n'a pas de portefeuille déterminé. Il est en revanche appréciable de noter le maintien de A. Siluanov au ministère des finances (après le départ de Koudrine) et l'arrivée de A. Beluossov au ministère du développement économique, ayant une bonne réputation professionnelle. Toutefois, ces deux personnages, bons "techniciens" dans leur domaine, n'ont pas de poids politique. Il faut également noter le départ de certains ministres ayant eu le temps et l’occasion d’acquérir une mauvaise réputation. C'est le cas de A. Furcenko (ministère de l'enseignement et de la recherche), T. Golikova (ministère de la santé) et R. Nurgalev (ministère de l'Intérieur). En effet, après l'échec de la réforme de la police et le nombre croissant de scandales, Nurgalev ne pouvait rester en place. Il a été remplacé par le chef de la police de Moscou, qui a une très bonne réputation - même dans la société civile, ce qui est rare - V. Kolokoltsev. Un autre point appréciable est la nomination d'un ministre pour le développement de la Sibérie et de l'Extrême Orient russe, ce qui semble être le signe du refus du Gouvernement de mettre en place cette énorme machine à corruption et à détournement de fonds publics que pouvait être l'Agence pour le développement des territoires de Sibérie et d'Extrême Orient. Mais il y a aussi des nominations qui ressemblent à des cadeaux personnels. C'est le cas notamment de l'attribution du poste de ministre de l'agriculture à N. Fedorov, qui s'était occupé de cette question en Tchouvachie, mais surtout qui a joué un rôle non négligeable dans le Front populaire de Poutine.[53]

 

Pour autant, les figures politiques fortes – et contestées - du gouvernement Poutine ont été déplacées à l’Administration présidentielle ou mises à des postes clés, moins en vue du grand public. Par exemple, le tant contesté ancien ministre de l'intérieur R. Nurgaliev se retrouve propulsé au Conseil de sécurité, I. Setchine récupère la compagnie étatique de pétrole Rosneft (qui sort en même temps du plan prévisionnel de privatisation), ainsi que par exemple les anciens ministres de la santé ou de l'économie gardent les mêmes compétences, mais auprès du Président.[54] Il s’agit donc de la mise en place d’un Gouvernement bis, mais du Gouvernement qui prend les décisions politiques, qui seront ensuite mise en œuvre par le Gouvernement technique de D. Medvedev.

 

Les deux groupes idéologiques, les deux clans, se sont donc regroupés à nouveau, changeant de configuration suite aux modifications intervenues avec les élections. Et si pluralisme politique il y a, malgrè la réforme à grand bruit sur l’enregistrement des partis politiques et le retour de l’élection des gouverneurs, elle se trouve justement incarnée par ces deux clans, qui défendent une idéologie très différente.

 

2.2 L’illusion du pluralisme politique et les modalités claniques de la vie politique

 

            La difficulté principale de l’analyse de la carte politique russe réside en le fait que tous les mouvements politiques ne correspondent pas à des partis politiques et que tous les partis politiques ne correspondent pas à des mouvements politiques différents, voire réels. A la Douma d’Etat, chambre basse du Parlement en Russie, sont représentés quatre partis politiques : Edinaya Rossiya [Russie Unie] dirigé maintenant par le Premier ministre D. Medvedev, Spravedlivaya Rossiya [Russie juste] dirigé par Sergueï Mironov, le LDPR (Liberal’no-democratitcheskaya partiya Rossii) [Parti libéral démocratique de Russie] dirigé par Vladimir Jirinovsky, un des neufs vice-présidents de la Douma d’Etat et le Parti communiste de Guénadi Ziouganov qui en dirige la fraction à la Douma d’Etat. Ce pluralisme apparent est toutefois trompeur[55]. Il serait possible de diviser les partis en partis de gauche pour les communistes et Spravedlivaya Rossiya, de centre droit pour Edinaya Rossiya et de droit pour le LDPR. Pourtant, si l’oposition des communistes est reconnue, celle de Spravedlivaya Rossiya est très récente et celle du LDPR fait sourire.

 

            La plus grande difficulté concernant l’appréciation du pluralisme politique en Russie vient de la déformation, non seulement du rôle du parti politique, mais également du fonctionnement du système de parti lui-même[56], comme a pu l’illustrer le fait pour V. Poutine de diriger jusqu’à l’année dernière le parti Edinaya Rossiya, sans en être membre. En effet, selon B. Makarenko, les partis politiques en Russie sont plus l’objet de la politique d’Etat que les sujets. Et le renforcement d’un parti dominant qui entraîne celui de l’exécutif ne permet pas aux partis de trouver leur place dans le système institutionnel. Le seul élément d’ouverture peut venir de la société civile et du renforcement de son rôle.

 

            Au regard de cette appréciation, le système des partis n’est pas apte à représenter la pluralité politique de la société. Et la grande réforme de la fin du mandat présidentiel de D. Medvedev, à savoir la réforme de la procédure d’enregistrement des partis politiques, dans le contexte actuel risque de n’avoir aucun effet profond. Cette constatation prend ses racines dans l’observation du fonctionnement de « l’ascenseur politique ». Un exemple récent est, en ce sens, frappant.

 

            Un député de Spravedlivaya Rossiya, G. Gudkov, s’est retrouvé au centre d’un scandale[57]. En tant que député, il lui est interdit de diriger une entreprise commerciale, d’autant plus quand ses activités commerciales sont en rapport avec l’activité du Comité de la Douma auquel il appartient, en l’occurence en matière de sécurité. Il lui est alors trop facile d’utiliser sa position pour favoriser le développement de ses affaires, ce qui fut le cas. Suite à une plainte déposée ; la Procuratura de la Fédération de Russie a contacté le président de la chambre basse, conformément à la législation en vigueur[58]. En cas de conflit d’intérêt, le député doit alors quiter ses fonctions. G. Gudkov criant à la falsification, puisque les affaires familiales avaient été transmises à sa femme ... qui lui avait fait une procuration pour la gestion de ce mêmes affaires dans date limite. Après enquête interne et suite à un vote des députés, son mandat lui a été retiré. Que s’est-il passé ?

 

            Il était de notoriété publique que le député G. Gudkov avait des affaires. Et il est loin d’être le seul, il s’agirait même de la majorité des députés, toute fraction confondue[59]. Cette pratique contestable n’avait toutefois pas provoqué de crise de consience au sein de l’appareil parlementaire, ni au sein de la commission parlementaire chargée de la surveillance et de la vérification des informations fournies en la matière par les parlementaires. Or, avec la montée des mouvements populaires au lendemain des élections législatives et présidentielles de 2011 et 2012, G. Gudkov s’est ouvertement prononcé contre le pouvoir en place et s’est retrouvé dans l’opposition. Il a fait à peu près la même démarche que S. Mironov. Les conséquences furent presques identiques.

 

            S. Mironov, président de la chambre haute du Parlement, à la tête du parti Spravedlivaya Rossiya, avait oublié qu’il était élu de Saint Petersbourg au nom de Edinaya Rossiya, le parti au pouvoir et le parti qui tient la ville dont il était élu. Or, il a commencé à vertement critiquer la gestion de la ville par Matvenko, alors Gouverneur Edinaya Rossiya de Saint Petersbourg.[60] Après plusieurs rappels à l’ordre, son mandat fut remis en cause par le parti local. Il a quitté la présidence de la Chambre haute, qui, ironie du sort, est tombée dans les mains de Matvenko.

 

            Première constatation. L’appartenance d’un homme politique à un parti revêt un caractère formel, mais qui devient réel, quand il ne joue plus selon les règles. Car ces individus se mettent en position de faiblesse. G. Gudkov contrevenait réellement à la législation sur le statut des députés en entretenant ouvertement des activités commerciales. S. Mironov avait choisi la facilité en se faisant élire non pas au nom de Spravedlivaya Rossiya mais de Edinaya Rossiya, afin de bénéficier du poids du parti pour gagner. Ils ont donc jouer selon les règles du système dans leur propre intérêt, avant de critiquer le système dont ils sont des rouages, mais sans vouloir en sortir, voulant continuer à en profiter personnellement. Le système a refermé la porte.

 

            Le second élément intéressant concerne les « à côté » de l’affaire Gudkov. Lors du vote en assemblée plénière à la Douma, les députés Edinaya Rossiya et ceux du LDPR (Jirinovsky) ont réunis 291 voix (sur les 226 nécessaires), contre 150 (Spravedlivaya Rossiya et parti communiste)[61]. A quelques exceptions près, comme le députés Mitrofanov[62], qui a ainsi pu se vanger de ses anciens collègues Spravedlivaya Rossiya, et qui s’est prononcé en faveur du retrait du mandat de G. Gudkov. La récompense ne s’est pas faite attendre. Le pouvoir l’a désigné à la tête de la commission sur les médias.

 

            La constatation suivante découle en réalité de la première. Puisque le critère d’appartenance réel n’est pas institutionnel, à savoir le parti politique, il est matériel, celui du lien d’allégeance au clan. Quand l’individu, quel que soit son parti fait allégeance au clan, surtout dans les situations conflictuelles, il est récompensé comme un des siens.

 

            Les exemples présentés ici permettent d’illustrer le caractère clanique du fonctionnement non seulement du pouvoir politique[63], mais également des institutions[64]. Et cet aspect clanique va être particulièrement intéressant à suivre avec le retour de V. Poutine. Sous la deuxième présidence Poutine, puis sous la présidence Medvedev, leur coexistence était plus ou moins pacifique, car leur poids était relativement équivalent. Or, aujourd’hui, le clan libéral se renforce et le combat intérieur s’intensifie. Ce qui pose de sérieux problèmes en terme de survie politico-constitutionnel actuel.

 

            Après l’ère B. Eltsine, le libéralisme à tout va a mis la Russie au bord de l’effondrement institutionnel, et presque géographique. La première présidence V. Poutine, dans un consensus généralisé, a concentré son énergie sur la restauration de l’autorité de l’Etat en tant qu’institution. D’un certaine manière, les libéraux ont accepté de renoncer à une partie pour ne pas perdre le tout. Mais le renforcement de Medvedev sous le second mandat Poutine marque le retour des libéraux sur la scène. La présidence Medvedev fut compensée par la gouvernance Poutine. Aujourd’hui, le conflit devient presque ouvert. Medvedev consolide autour de lui et du Gouvernement une sorte de « Gouvernement ouvert »[65] qui concentre tout ce qui les milieux politiques et la société civile compte de plus libéral, presque à l’extrême. C’est la politique du repli de l’Etat, du tout marché, de l’expansion d’internet et de l’autogestion « sociétale ». Ligne directrice qui a provoqué une confrontation frontale sur l’établissement du budget 2013[66], la sanctions de quelques ministres. Medvedev a baissé la tête, le projet de budget a été modifié en urgence en tenant compte de la dimension sociale défendue par l’Administration présidentielle aujourd’hui. Ce combat se stigmatise également autour des relations avec l’étranger, surtout les Etats Unis. La plus grande partie des organes influents de la société civile en Russie sont financés sur des fonds américains, ce qui a commencé à posé un problème de politique intérieur. Le durcissement du ton a conduit à l’adoption d’une loi soumettant à un régime spécial les ONG ayant une activité politique en Russie financée par l’étranger et à la discussion d’un projet de loi renforçant leur responsabilité[67], au départ de l’USAID (le plus gros financeur des ONG civile)[68], à un projet de loi élargissant la notion de trahison d’Etat à tel point que les scientifiques russes risquent de trahir leur pays sans le savoir[69]. Dans ce contexte, quand un rapport d’un Institut d’analyse proche du Kremlin pointe du doigt le rôle des réseaux sociaux dans le déroulement des mouvements contestataires, au moins sur le plan de l’organisation, D. Medvedev rencontre officiellement Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook[70]. Facebook est moins développé en Russie que d’autres réseaux sociaux russes, et l’opération de comm menée de main de maître va effectivement permettre de renforcer son rôle. Ce qui va à l’encontre total de la politique menée. De la même manière, alors que la Russie s’évertue à faire revenir els cerveaux dont elle a besoin pour déveopper son économie, M. Zuckerberg est venu débauché avec l’appui de la Maison blanche russe. Passage au journal du soir, invitation dans un grand show télévisé, leçon à l’Université d’Etat de Moscou, etc. Deux politiques totalement contradictoires se mettent en place. Et chacune provoque l’autre, insite l’autre à se retrancher dans les extrêmes.

 

            Mais le plus grand problème vient du fait que ces deux clans qui commencent à réellement s’affronter, ne sont pas formalisés en partis politiques. Ils ne peuvent donc pas réguler leurs conflits par le biais des élections. Les électeurs ne peuvent pas être arbitre de ce conflit et choisir la voie à suivre. C’est justement cette absence d’institutionnalisation qui met en danger l’institution étatique russe aujourd’hui. Danger renforcé par le retour de V. Poutine à la présidence, par le maintien de D. Medvedev au pouvoir par l’intermédiaire du Gouvernement. Le danger ne vient pas de leur personnalité. Le danger vient du fait même de leur présence, de l’impossibilité du départ. De l’impasse politique, renforcée par la faiblesse de l’opposition politique, à savoir de personnes aptes à proposer une voie alternative et pas seulement à organiser des manifestations.

 

 

 

           

 

 

 

 

 

 

                       

 

 

 

 



[1] Félix Piat, Débats à l’Assemblée constituante de 1848
[2] Fonctionnellement, la loi constitutionnelle fédérale dans le système normatif russe correspond à la loi organique dans le système français.
[3] Loi constitutionnelle fédérale sur le Gouvernement de la Fédération de Russie du 17 décembre 1997 N° 2-FKZ (dans la rédaction du 28 décembre 2010 N° 8-FKZ)
[4] Voir V. Loutchine, Konstitutsiya Rossiïskoï Federatsii problemy realisatsii, éd. Unity, Moscou, 2002, p. 447-448
[5] Voir N. V. Vitrouk (sous la dir. de), Konstitutsionnoe pravo Rossiïskoï Federatsii, éd. Norma, Moscou, 2010, p. 444-472
[6] S. A. Avakian, Konstitutsionnoe pravo Rossii Tom 2, éd. Iurist, Moscou, 2006, p. 284
[7] Idem, p. 291
[8] Idem, p. 298
[9] Article 83 point « a » de la Constitution de 1993
[10] Article 83 point « v » de la Constitution de 1993
[11] Article 32 de la loi constitutionnelle fédérale sur le Gouvernement, dans la rédaction de la loi du 28 décembre 2010 n° 8-FKZ
[12] Article 35 de la loi constitutionnelle fédérale sur le Gouvernement, dans la rédaction de la loi du 28 décembre 2010 n° 8-FKZ
[13] Art 47 de la loi constitutionnelle fédérale sur le Gouvernement, dans la rédaction de la loi du 28 décembre 2010 n° 8-FKZ
[14] Article 83 « i » de la Constitution de 1993
[15] Oukase du Président de la Fédération de Russie sur l’Administration présidentielle du 25 mars 2004 n°400
[16] Oukase du Président de la Fédération de Russie sur le règlement de l’Administration présidentielle du 6 avril 2004 n°490
[17] Oukase du Président de la Fédération de Russie sur l’amélioration de la structure de l’Administration présidentielle du 12 février 1998 n°1962
[18] Oukase du Président de la Fédération de Russie sur l’amélioration de la structure de l’Administration présidentielle du 28 juin 2005 n° 736
[19] Ceci fut par exemple le cas du département des affaires étrangères, dont le règlement intérieur a été modifié par les oukases du 21 octobre 2088 n° 1510 et du 14 janvier 2011 n° 38 après son adoption par l’oukase du 29 juin 2004 n° 815
[20] Pour plus de détails sur les résultats des législatives de 1999, voir J.-P. Massias (sous la dir. de), Droit constitutionnel des Etats d’Europe de l’Est, PUF, 2008, p. 517
[21] Idem, p. 519
[23] Voir la publication de la proclamation officielle des résultats par la Commission centrale électorale dans le journal Rossiïskaya gazeta (journal, notamment pour les publications officielles) http://www.rg.ru/2008/03/08/cik-president-dok.html , arrêté du 7mars 2008 n° 104/777-5
[25] Russie Unie
[26] Russie Juste
[27] Le parti agraire
[28] La force civile
[30] Voir les vidéos du discours de V. Poutine http://youtu.be/v6g2qXS6CoU et de l’arrivée sur la place rouge www.youtube.com/watch?v=ZCZb0TWulM8
[31] Voir http://www.newsru.com/russia/03mar2008/nabludat.html
[32] M. A. Krasnov, Zakonodatelno zakreplennye polnomotchiya Presidenta Rossii: neobkhodimost ili servilism?, Sravnitelnoe Konstitusionnoe Obozrenie, 2011, n°4, p. 91-103
[33] Loi constitutionnelle fédérale du 21 juillet 1994 n°1-FZ (dans la rédaction du 28 décembre 2010) sur la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie, art.  23.
[34] Loi fédérale du 10 novembre 2009 n° 259-FZ sur l’Université d’Etat de Moscou Lomonossov et sur l’Université d’Etat de Saint Petersbourg, art. 2.5.
[35] Loi fédérale du 6 octobre 1999 n° 184-FZ (dans la rédaction du 2 mai 2012) sur les principes généraux de l’organisation des organes législatifs et exécutifs du pouvoir d’Etat dans les Sujets de la Fédération de Russie, art. 19.1.g et art. 26.3.2
[36] Loi fédérale du 7 février 2011 n°3-FZ sur la police
[37] La loi fédérale du 11 juillet 2001 n° 95-FZ sur les partis politiques a été modifiée par la loi fédérale du 28 mars 2012 n° 28-FZ
[38] Voir l’article de N. Petrov, Obilie slabogo gossudarstva, Pro et Contra, Tome 15, n°5, septembre-octobre 2011, http://carnegie.ru/proEtContra/?fa=46587
[39] Loi constitutionnelle fédérale du 2 juin 2009 n° 2-FKZ
[40] Loi constitutionnelle fédérale du 3 novembre 2010 n° 7-FKZ
[41] V. Surkov a longtemps été l’idéologue du Kremlin, auteur de la conception de la « démocratie souveraine », il dirigea largement la politique intérieure sous Medvedev et fut associé à la conceptualisation politique du mouvement de libéralisme sous cette présidence.
[42] V. Volodine est un poutinien de la première heure.
[43] S. Narychkine dirigeait l’Administration présidentielle depuis 2008.
[44] B. Gryzlov s’était rendu tristement célèbre pour avoir déclaré, en substance, que le Parlement n’était pas un lieu de discussion.
[47] Le Parti Russie Unie est difficile à placer sur l’échiquier politique au regard des critères français. Ce parti a été créé comme un parti de bureaucrates, de fonctionnaires, qui n’a pas d’idéologie précise. On y voit une ligne libérale et une ligne sociale, dont le poids relatif évolue en fonction des nécessités du pouvoir.
[48] Le Parti communiste est considéré comme le successeur du Parti communiste de l’Union soviétique. Mais en dehors des références formelles à Lénine ou Staline, d’une certaine glorification de la période soviétique dans les discours, son idéologie telle que ressortant de la pratique, semble plus proche de celle des sociaux-démocrates. C’est le parti le plus à gauche sur l’échiquier politique représenté à la Douma (chambre basse du Parlement).
[49] C’est le premier nouveau parti créé à la fin de la période soviétique, certains ont dit qu’il fut créé sous les auspices du KGB et sert aujourd’hui de plateforme de propagande des idées d’extrême droite « polissées », que Russie Unie ne peut se permettre d’avancer aussi clairement. C’est un des partis de l’opposition de poche.
[50] Le Parti Russie Juste fut un projet du Kremlin lancé il y a quelques années pour réduire le poids électorale du Parti communiste. Il reflète une idéologie de gauche classique. Ces deux dernières années, il tente de s’autonomiser de Russie Unie, ce qui a conduit son dirigeant S. Mironov au départ de la présidence de la chambre haute du Parlement, le Conseil de la Fédération.
[52] Il s’agit d’un groupe informel consultatif d’experts qui peut conseiller le Gouvernement. Il est constitué essentiellement de membres libéraux, voire ultra-libéraux.
[55] Sur le multipartisme en Russie, voire l’article de A. N. Koulik, Mnogopartiïnost’ v elektoral’noï democratii postsovietskoï Rossii : v tchem smysl eio souchestvovaniya ?, in M. V. Iline et S. V. Rogatchev (sous la dir. de), Rossiya. Polititcheskie vyzovy XXI veka, ROSSPEN, 2002, p. 189-194
[56] Voir B. Makarenko, Stsenarii evolutsiipartiïnoï sistemy, Pro et Contre, tome 14, n°4-5, juillet-octobre 2010, http://www.carnegie.ru/proEtContra/?fa=42248
[58] Loi fédérale du 8 mai 1994 n° 3-FZ (dans la rédaction du 21 novembre 2011) sur le statut des membres du Conseil de la Fédération et le statut des députés de la Douma d’Etat de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie, art. 4
[61] Voir http://lenta.ru/lib/14171939/ et http://www.rg.ru/2012/09/13/duma-site.html
[63] Voir A. Makarkine, Politico-economitcheskie klany sovremenoï Rossii, Tsentr polititcheskykh tekhnologuiï, 2003.
[64] Voir ici l’analyse de M. Vinogradov concernant l’influence des clans sur les relations Fédération/Sujets http://stratagema.org/publications/politics/item_1851.html
[65] Vous trouverez ici son site officiel http://большоеправительство.рф/
[66] Voir http://russiepolitics.blogspot.com/2012/09/la-crise-autour-de-ladoption-du-budget.html
[67] Voir http://russiepolitics.blogspot.com/2012/09/les-ong-agents-etrangers-encore-sous-le.html
[68] Voir http://www.bbc.co.uk/russian/russia/2012/09/120918_usaid_russia_criticism.shtml
[69] Voir http://russiepolitics.blogspot.com/2012/09/une-radicalisation-de-la-conception-de.html

1 commentaire:

  1. Naturalmente,questo dotto articolo appartiene ad una dottrina che è nata in Occidente quasi tre secoli fa ma ha stentato ad affermarsi nel mondo.
    Direi che L'autrice avrebbe difficoltà,in chiave politica, a trovare sostanziali differenze con il modello Occidentale incardinato negli USA.
    Posso suggerire all'autrice che i sistemi costituzionali non possono avere vita longeva se si tratta di Stati che aspirano a diventare egemoni nel mondo?
    Questo articolo è sviluppato con una tesi sottobraccio neanche molto velata e che riguarda non tanto il sistema Costituzionale ed i suoi contrappesi ma la figura di Putin che in modo evidente è di ostacolo agli apologeti dell'Occidente.
    Con tutto il rispetto per la dott.ssa in diritto costituzionale,oso immaginare che non potrebbe mai far parte di un'élite che abbia responsabilità di sorta nella conduzione dello Stato.
    E'molto più comodo atteggiarsi a scienziato del diritto costituzionale e criticare coloro che in quell'ambito devono gestire le ambizioni umani e "correggere" le norme che indeboliscono lo Stato minacciato dall'esterno.
    I cultori del diritto devono consigliare il "Principe" non lavorare sbalzarlo di sella .

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